Le samedi 8 décembre à partir de 19h00
Espace Voltije Editions Ltd
[Art contemporain]
2, rue du centre
29640
Plougonven (à 10 mn de Morlaix)
Seront présentés des billets de train dessinés publié dans Vativien
Vativien
Fo prann lo trin, pou kas kontour ART
Dessins sur des billets de train
André Robèr
Padport Carpanin Marimoutou
EAN 9782910791773 Prix 20 euros
Extrait Préface :
Vativien désigne, dans mon pays, cet aller-retour permanent entre le
monde des morts et celui des vivants, ce franchissement aisé des
frontières entre l'univers des ancêtres et celui de leurs descendants
trop souvent oublieux. André Robèr a souvent peint, dessiné, poétisé
cette spectralité, ces frontières poreuses et invisibles, ces
itinéraires en attente de stations, de halte, de repos. D'une certaine
façon, le poème visuel - encore plus que l'écriture - est une affaire de
fantômes. À la manière d'un musée postcolonial, André Robèr
collectionne des itinéraires, les crée, leur donne du sens, les relie à
un point d'arrivée, une halte, une station. Quelque part où quelqu'un
attend le voyageur, qui qu'il soit, d'où qu'il vienne. Quelque part où
il reçoit accueil, hospitalité, soin et tendresse. Manzé pou le zié,
manzé pou le kor, manzé pou la lang, manzé pou le kèr.
Est-ce en réminiscence des trains disparus du pays d'enfancesp;? Est-ce
en respect profond de ceux dont l'itinéraire ne s'arrête nulle part et
dont le point de départ est à jamais perdusp;? Les billets de trains
éphémères que délivrent des machines automatiques gérées par ordinateur
deviennent ainsi, pour et grâce à André Robèr, les surfaces
d'inscription de fantômes qui prennent enfin corps et qui attendent que
nos voix les parlent, que nos yeux les voient, que nos bras s'ouvrent et
que nos mains réparent leurs blessures. Sur les voies des trains à
grande vitesse qui circulent au nord du monde et où s'asseyent désormais
les spectres d'un univers où les êtres humains ont été transformés à
leur tour en marchandise, en colis, en fiches de rendement, comme les
ancêtres de mon propre monde, les fantômes peuvent trouver une place où
s'asseoir et poser. Pour se reposer enfin. Trouver une halte, une
station, un accueil. Le billet des trains à grande vitesse, où s'étalent
d'habitude des numéros et des noms, des assignations de place, de date,
de lieu, devient ainsi poème, c'est-à-dire espace même de l'accueil,
signe et demeure de l'hospitalité. Par définition les itinéraires, même
ceux des trains super-rapides, ne sont pas rectilignes. Ils kaskontour.
Ceux des ancêtres et des fantômes des mondes créoles le sont encore
moins, eux qui sont toujours dans l'entre-deux, l'entre-trois,
l'entre-quatre, l'entre-cinq, l'entre-six, et bien plus encore. Eux dont
les mondes se sont croisés de leur vivant, mais bien plus encore dans
les parcours de leurs descendants si désirés et si oublieux. Aucune
ligne droite ne mène des terres d'origine aux terres d'arrivée, surtout
si le cheminement se fait par mer, au rythme des vagues, des courants et
des moussons. Mais les lignes sont encore moins droites, qui se sont
croisées et entrecroisées, qui se croisent et s'entrecroisent dans les
cœurs et les corps d'Afrique, Madagascar, Comores, Europe, Inde, Chine,
et tant d'autres pays. Encore encore moins le sont-elles dans ce partage
des rites, des déesses et des dieux, des fêtes, des cuisines, des
savoirs, des rires, des amours et des pleurs. Encore encore encore le
sont-elles moins encore dans la langue inventée qui est la nôtre par don
multiple de nos ancêtres inconnus et oubliés.
Étrange est l'écho que le train à grande vitesse du monde postmoderne
occidental offre à ces figures du monde colonial et postcolonial venus
du sud. Comme si, cette fois-ci c'était le temps qui était dans le
vativien et dans le kaskontour. Comme si, cette fois-ci, c'était
l'espace qui était dans le vativien et dans le kaskontour. Et dans ce
vativien, dans ce kaskontour, qui est l'hôte de quisp;? Qui se repose
enfinsp;; qui permet enfin le repossp;?
Pour mieux repartir à chaque fois. Chacun de son côté. Chacun relançant
son propre itinéraire. Mais en ayant enfin inscrit une trace, trouvé et
proposé un accueil, en s'étant installé dans un lieu. Provisoire,
toujours provisoire. Mais où l'errance, momentanément, a pris fin. Où le
dialogue, l'échange et la tendresse ont eu lieu.
Pour une relance désormais infinie. Et infiniment pacifiée.
Carpanin Marimoutou
Les éditions K'A et André Robèr seront au
salon du livre de Vias (34)
le 8 décembre 2012
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